Surfant sur la potentielle pandémie de grippe A(H1N1), plusieurs laboratoires vantent les mérites de gélules pour lutter contre les virus. "Grippe A et autres maux de l'hiver : comment s'y préparer", annonce Merck pour promouvoir sa gamme Bion, "les probiotiques de l'hiver". Est-ce bien nécessaire ? Existe-t-il des "recettes" pour mieux préparer son organisme à affronter la grippe ?
"Il n'y a pas de lien entre alimentation et risque infectieux sauf, évidemment, pour les personnes en dénutrition", résume Serge Hercberg, vice-président du Comité stratégique du programme national nutrition santé (PNNS). "Toute malnutrition augmente la vulnérabilité aux infections", rappelle le Réseau Environnement Santé (RES).
Manger équilibré et sans excès. Tel est le mot d'ordre pour renforcer ses défenses immunitaires. La suralimentation, qui peut se traduire par un excès d'apport en lipides ou en sucres ajoutés, baisse la résistance bactérienne. "Toute alimentation industrielle transformée (sodas, nuggets...) réduit la concentration en micronutriments et favorise la baisse des défenses immunitaires", affirme le nutritionniste Laurent Chevallier.
Huîtres, ail et champignons. Certains aliments doivent être privilégiés. Ainsi, "les fruits apportent des micronutriments, vitamines et antioxydants qui s'opposent aux radicaux libres pour renforcer les défenses immunitaires", souligne le docteur Arnaud Cocaul, nutritionniste à l'hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière. "Il faut manger des crudités et des légumes verts, riches en vitamine C et en fer, le fer végétal étant mieux absorbé", précise le docteur Catherine Delplanque, homéopathe, qui préconise, chaque matin, le cocktail 421 (4 oranges, 2 citrons, 1 pamplemousse).
"On ne doit pas manquer de zinc, très présent dans les huîtres", insiste le docteur Chevallier, ni de sélénium, ni de "protéines, notamment pour leurs acides aminés indispensables", complète Jacques Fricker, médecin nutritionniste. Ne pas oublier non plus "la vitamine D, nutriment essentiel ; or 70 % des Français en sont déficitaires en hiver", insiste le docteur David Servan-Schreiber. Autres "dadas" de l'auteur du best-seller Guérir : "Les champignons, notamment les japonais ou les pleurotes, parce qu'ils stimulent eux aussi les défenses immunitaires" ainsi que "l'ail, l'oignon et l'échalote, qui aident à lutter contre les infections". Et David Servan-Schreiber d'ajouter : "Je constate que les patients qui ont une alimentation équilibrée (plus de fruits et
légumes, moins de viandes) et qui ne fument pas me disent tous "j'ai moins de rhume"".
Par ailleurs, "des études montrent que les probiotiques améliorent la réponse vaccinale, et les prébiotiques (fibres alimentaires présentes dans de nombreux végétaux) fortifient la flore intestinale", poursuit Jean-Michel Lecerf, médecin nutritionniste à l'Institut Pasteur de Lille. Quant aux fameux "acides gras essentiels (omega 3, omega 6), ils renforcent les défenses immunitaires en général", selon le docteur Fricker.
L'illusion des compléments alimentaires. "Les compléments alimentaires n'ont aucun intérêt, ce n'est que du marketing, lâche Serge Hercberg. Pis, une prise excessive, notamment en béta carotène, peut comporter des risques."
Pour le docteur Alain Pradignac, de l'hôpital de Hautepierre (Strasbourg), "les laboratoires surfent sur la vague de l'inquiétude. Toutefois, les compléments alimentaires présentent peu de risque de toxicité lié à un excès". Surtout, "les gens s'appuient parfois sur la prise de ces pilules pour se dédouaner d'une alimentation correcte", constate le docteur Cocaul. Certes, "une alimentation équilibrée devrait suffire, mais souvent on en est loin ; les gens ont donc souvent besoin d'oligo-éléments, considère le docteur Delplanque. C'est pourquoi je préconise des cures, de cuivre ou de sélénium, par exemple, mais sans faire de l'automédication", insiste-t-elle. Mieux vaut demander conseil à son médecin et ne pas acheter ces produits sur Internet.
Responsable médical au sein du laboratoire Merck, qui commercialise des compléments alimentaires, le docteur Olivier Joly préconise ces gélules "en renfort, pour mieux affronter l'hiver". Il met en avant une étude publiée en 2005 dans Clinical Nutrition selon laquelle "la prise de bactéries probiotiques pendant au moins trois mois a significativement abrégé de près de deux jours la durée des épisodes de rhume, des syndromes pseudo-grippaux et a réduit la sévérité des symptômes".
Un peu de bon sens. Outre une alimentation équilibrée, il est aussi conseillé, pour protéger son organisme, de faire du sport - mais pas trop - de bien dormir et de limiter les facteurs de stress oxydant (tabac, pollution, pesticides, etc.). Pasteur ne disait-il pas "le microbe n'est rien, le terrain est tout" ?
Source: lemonde.fr
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